Journal d’une repentie

J’ai arrêté de fumer sans trop de souci, par moi-même lors de ma première grossesse. Le « par moi-même » n’était pas vraiment un choix mais une obligation suite à la réponse de mon généraliste quand je lui ai demandé de l’aide: « la nicotine est déconseillée au femmes enceintes, vous pensez bien que les substituts nicotiniques aussi! ». Ok…

L’envie de fumer est passée au final assez facilement parce que je ne le faisait pas pour moi mais pour un intérêt supérieur: mon bébé. Et maintenant que je suis mère de mes deux poupées je me sens le devoir de rester en bonne santé pour m’occuper d’elles et aussi de leur donner le « bon exemple ».

Six années ont passées depuis ma dernière cigarette. Mais cela fait quelques temps maintenant que ça ne va pas très fort…

Mardi

Si le tabac ne m’a plus manqué au fil du temps, cela fait quelques semaines que cela est plus compliqué. Et puis j’ai craqué, j’ai demandé à une amie si je pouvais prendre une bouffée sur sa cigarette pendant une pause au travail. D’une bouffée finalement j’ai fini la cigarette. Sentir la fumée passer dans ma gorge puis l’expirer, quelle sensation! En revanche, moi qui fumais des fortes, heureusement que celle-ci était une légère parce que je crois que je serais encore en train de tousser. La nicotine m’a presque donné l’impression d’être stone! Ce sont alors mêlés deux sentiments assez antagonistes: zenitude (nicotine, stone tout ça) et culpabilité. J’ai tenu 6 ans c’est con quand même… Et puis comment j’allais dire à Jiminy que j’avais craqué? Parce que j’ai toujours dit que j’avais la sensation d’être comme une ancienne alcoolique qui ne devait jamais retoucher un verre sous peine de rechuter. De retour à la maison j’avoué, faute avouée est à moitié pardonné comme on dit.

Mercredi

Jour de 80%, tranquille à la maison. Le tabac va t il se rappeler à moi? Non, je suis fatiguée, je me repose, range, bref je m’éclate. Je tombe sur un épisode de Friends dans lequel Chandler se remet à fumer, je me suis dit que c’était de circonstance. Ironic comme dirait ma copine Alanis. La journée se passe donc tranquillement.

Jeudi

Direction ma tour de verre après m’être extirpée de ma bétaillère et être passée devant deux femmes qui faisaient la manche avec leurs enfants dans les bras. Il y a un tabac en bas de la tour je m’y dirige presque machinalement. Un paquet coûte 7€, SEPT EUROS!! Quand je me suis arrêtée il était à 4,60€. Il se trouve que je n’ai pas de liquide et que la carte n’est acceptée qu’à partir de 20€. J’aurais pu prendre ça pour un singe. J’aurais pu… A la place, au cours de la mâtiné j’ai fait une pause, retiré des sous et suis retournée voir le dealer. Contre la fameuse somme exorbitante de 7€ je suis repartie avec mon paquet de cigarettes. Mais je me suis mise d’accord avec moi même, c’est le bureau qui me stresse, c’est là que j’ai besoin d’être zen donc le paquet restera dans le tiroir de mon caisson! Sans compter que je serais vraiment honteuse de le décevoir si Jiminy tombait dessus. Au final j’en ai fumé deux dans la journée et franchement pas envie de plus. Mais une chose m’obsède: je « pue », mes doigts sentent, mon écharpe aussi certainement, et mon haleine?? Donc avant de rentrer à la maison lavage de main et avalage d’un paquet de petit gâteaux en guise de cache misère. Elle est belle la fumeuse honteuse.

Vendredi

Envie de céder à ce petit plaisir coupable et en même temps après j’ai la bouche pâteuse et l’impression de sentir à 3kilomètres. je décide donc, en toute logique, de céder puis de passer chercher un café pour masquer l’odeur. Vous croyez que ça tient devant un tribunal « altération du jugement dû à la consommation de nicotine? » Non parce qu’il faut admettre que c’est idiot comme idée…

Samedi – Dimanche – Lundi

Week-end en famille au bord de notre océan, aucune cigarette ne m’a traversée l’esprit.

Mardi

Retour au bureau. Elles sont là dans mon tiroir, je le sais! Je suis fatiguée, un peu au bout, je ferai trois « pauses » dans la journée avec toujours ce même enchainement de sensations: plaisir – effet stone – bouche pâteuse – doigts et haleine qui puent.

Mercredi

Rendez vous chez le médecin avec à la clef un arrêt de quinze jours. A la maison je n’y pense pas. L’envie est parfois là quand je sent l’odeur du tabac mais je gère bien. En fait j’ai parfois l’impression d’avoir sur l’épaule droite Al Paccino dans L’associé du diable qui me dit que de temps en temps céder à la tentation n’est pas si grave, et sur l’épaule gauche un petit ange avec une palanquée de bons arguments: cancer, budget tout ça…

Bref, la grande question est: que se passera t il lorsque je retrouverai mon bureau en haut d’une tour d’où je vois la ville à l’envers mais d’où je suis très loin de contrôler mon univers? La suite au prochain épisode, ou pas. Mystère…